Tribunal
permanent des peuples : Les violations des droits de l'homme
en Algérie
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Résumé du Dossier
n° 4 : Les détentions
arbitraires
(Yahia
Assam)
Dossier
complet (pdf)
Après l’annulation, en janvier 1992, du second tour des
premières élections
législatives pluralistes que le Front islamique du salut (FIS)
s’apprêtait à remporter,
des milliers de membres et sympathisants présumés de ce
parti ont été arrêtés et placés en
détention
administrative, sans inculpation ni jugement, dans des camps d’internement
situés dans le désert du sud algérien.
Selon l’Observatoire national des droits de l’homme (ONDH), à la
fin de l’année 1996, le nombre total des détenus
dans les cent seize établissements pénitentiaires (toutes
catégories
confondues) était de 43 737, dont près de la moitié étaient
poursuivis pour terrorisme et subversion, alors que le nombre total de
prévenus jugés par les tribunaux criminels était
de 19 572, dont 16 809 ont été poursuivis pour des faits
de terrorisme et de subversion.
Sur le plan de la loi, le décret de lutte antiterroriste promulgué en
septembre 1992 a incorporé de nouveaux amendements aux lois régissant
les procédures d’arrestation (voir Dossier n° 15).
Ces amendements ont largement contribué à étendre
le phénomène
des arrestations arbitraire. À titre d’exemple, jusqu’en
1992, les policiers n’étaient habilités à procéder à des
arrestations que dans leur zone d’affectation. Leur compétence
territoriale pouvait être élargie en cas de situation exceptionnelle, à la
demande d’un magistrat ; les policiers qui intervenaient hors
de leur zone d’affectation devaient toutefois être accompagnés
d’un policier de la zone dans laquelle se déroulait l’opération.
Mais la loi qui a été modifiée en septembre 1992
permet aux policiers d’agir dans tout le pays sans avoir à solliciter
l’autorisation de la police ni des magistrats compétents
dans une zone donnée. Ainsi, il est possible que les policiers
compétents
dans une préfecture ne soient pas informés d’une
arrestation opérée par des membres de la Sécurité militaire
(DRS) ou d’autres branches des forces de sécurité.
En outre, le manque de communication et de coordination entre la police,
la gendarmerie, la Sécurité militaire et les autres branches
des forces de sécurité semble avoir aggravé la situation.
Les procédures d’arrestation et de placement en détention
ainsi que les vastes pouvoirs dont bénéficient en toute
impunité les
forces de sécurité, qui agissent hors de tout contrôle
des autorités judiciaires et en violation de la législation
algérienne elle-même et du droit international, favorisent
largement la pratique de la détention arbitraire et/ou secrète.
L’utilisation systématique de cette dernière est
l’un
des principaux facteurs qui a favorisé le phénomène
de la disparition forcée, l’utilisation systématique
de la torture et des exécutions extrajudiciaires dans les centres
de détentions (voir Dossier n° 5).
En effet, la législation algérienne, depuis la promulgation
de la loi antiterroriste, permet de maintenir des suspects en garde à vue
pendant douze jours, ce qui est contraire aux traités internationaux
relatifs aux droits humains que l’Algérie a ratifiés.
Et cette législation n’est même pas respectée
: les prisonniers sont souvent maintenus en détention secrète
par la police, la gendarmerie et les services de sécurité de
l’armée pendant des semaines, voire des mois ou des années.
Certains sont ensuite relâchés sans inculpation ou transférés
dans d’autres centres de détentions non reconnus. Mais la
plupart ont disparu.
Ce n’est qu’en 1999 que le Comité international de
la Croix-Rouge, après une absence de sept ans, a pu effectuer
des visites dans les prisons, ce qui lui a permis de voir dix-sept lieux
de détention
administrés par le ministère de la Justice. Depuis 2002,
le CICR a également pu se rendre dans un certain nombre de postes
de police et de centres de détention gérés par la
gendarmerie. Toutefois, le comité n’a pas pu parler à des
personnes qui sont détenues dans des casernes militaires. Le CICR
n’a pas publié ses rapports.
Ce dossier traite la question de la détention arbitraire telle
qu’elle
est définie par l’article 9 de la Déclaration universelle
des droits de l’homme (« Nul ne peut être arbitrairement
arrêté, détenu ni exilé ») et par le
premier alinéa de l’article 9 du Pacte international relatif
aux droits civils et politiques (« Tout individu a droit à la
liberté et à la sécurité de sa personne.
Nul ne peut faire l’objet d’une arrestation ou d’une
détention
arbitraire. Nul ne peut être privé de sa liberté,
si ce n’est pour des motifs et conformément à la
procédure
prévus par la loi »). Le conflit algérien ne se résume
toutefois pas uniquement aux arrestations et déten-tions arbitraires
dont les auteurs sont des agents de l’État : des milliers
d’autres personnes ont été aussi enlevées
par des groupes armés islamistes, notamment des femmes, détenues
et souvent violées puis exécutées (voir Dossier
n° 10).
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